L'AIKIDO est une discipline qui peut être vue sous différents éclairages selon ce que peuvent rechercher les pratiquants à un instant donné : 1) Une Méthode réaliste de défense anti agressions à l'opposé des techniques "magiques » de "self défense" qui ne font que tromper les personnes sur leurs réelles capacités, en les mettant objectivement en danger. 2) Des Techniques de maîtrise des énergies  où, notamment, les notions de respiration, de centre, de posture, de distances et de placement, optimisent les capacités énergétiques des individus 3) Une Discipline de santé et d’entretien physique accessible à tous où, notamment, le principe central de non résistance rend durable et optimise les acquis de la pratique tout au long de la vie. 4) Un art de vivre au quotidien, où ce même principe de non résistance conforté par un positionnement adapté et une posture traduisant une plénitude énergétique, améliorent les relations et l’ouverture aux autres, rejoignant ainsi la finalité décrite par o sensei morihei UESHIBA : un art de guerre qui conduit à la Paix.5) Une philosophie résultant d’une pratique qui permet de découvrir des cultures ancestrales pleines d’enseignements.

+

shisei

Shisei

 

SHI

 

SEI

 

 

 

 

 

 

Shi (sugata) : Forme, figure, taille. Sei (ikoi) : Force, vigueur, vivacité.

 

 

Cet idéogramme signifie, littéralement, posture ou position. Traduit en français, nous l'avons déjà vu pour le Ki, l'idéogramme donne deux définitions apparemment antagonistes.

 

Shi signifie  quelque chose de statique telle la montagne imposante par exemple, pleine d'inertie et de stabilité, tandis que Sei exprime le dynamisme,l'actif ou l'impétuosité. Comme pour le Ki, les deux aspects de l'énergie sont représentés, l'un n'étant pas l'opposé de l'autre. C'est encore une 'fois le jeu du Yi.1et du Yang,du solide contre un potentiel énergétique (la réaction nucléaire en est un exemple). Toute création du manifesté ne peut être qu'un avatar de l'énergie. Shisei serait donc  la posture, l'attitude  physique idéale qui permettrait  au Ki universel de s'écouler - à la fois la première condition avant de réaliser quoi que ce soit de technique- et la dernière, car la qualité du Shisei trahit l'expert et tout le vécu du pratiquant. Voyons physiquement en quoi consiste Shisei.

 

 

Les pieds

 

La position des pieds en Aïkido est une de ses spécificités sur les autres arts martiaux. En effet, prenons la position debout pieds écartés.

 

 

Les pieds en Aïkido sont parallèles, écartement identique à la largeur des épaules, le poids réparti sur les deux jambes. Exécutons un quart de tour vers la droite ou la gauche et nous aurons une position que l'on appelle : San Kakuho.

 

San:  3  Kaku :côtés  Ho : direction

Le poids toujours réparti sur les deux jambes, genoux légèrement  fléchis, talons sous lesquels peut passer une feuille à cigarette, le contact se fait avec les plantes des pieds.

Le bassin parfaitement  centré et positionné. La colonne vertébrale droite.

La tête  bien  dans  l'axe, le  regard  à  la hauteur  normale  des yeux. Une

mauvaise position de la tête entraîne un déséquilibre de tout le corps (cette caracté­

ristique est utilisée pour les techniques. Exemple : lrimi  nage).

 

Une partie de l'énergie et le support  de l'esprit  sont attribués au regard :

 

- La fascination de l'adversaire qui, sans effort, tue son ennemi comme s'il avait son consentement.

 

- La fixation de l'esprit de l'adversaire afin de mieux le maîtriser est une des bases de l'Aïkido.

 

- Si le regard est tourné vers le haut lors du Tai Sabaki, on s'aperçoit très vite du manque d'équilibre.

 

- Si nous regardons ses pieds, la tête nous tourne très vite et nous manquons aussi d'équilibre.

 

Dans les deux cas, on ne peut maîtriser l'espace environnant : nous avons vu la place et l'importance de la tête dans les chutes.

 

Si un écartement important  des pieds assure un meilleur  équilibre, cela ne permet pas un déplacement  rapide. Trop rapproché, on manque d'équilibre. Une juste mesure en tout est la voie de la sagesse orientale.

 

Notre posture pyramidale  a aussi plusieurs avantages. Comme nous le verrons dans un autre tome, les points vitaux sont pratiquement tous situés sur l'axe du corps et cette position, aussi choisie par les escrimeurs, permet de les cacher. Avant de les atteindre, il y a tout le rempart des muscles et os des bras, des côtes, même si le coup passe, il n'est pas très efficace et l'adversaire n'aura plus le loisir de recommencer. Cette position oblige donc l'attaquant  à se découvrir plus que prévu et permet  de contrôler  visuellement  180°.  La maîtrise  de lrimi  impo  permet  de contrôler  rapidement  les 180° manquants sans se déplacer.

 

En fait, si l'attitude physique  - l'aspect yin - est la plus évidente, la plus apparente, l'aspect yang fait aussi partie de l'exercice ; la concentration, le regard etc ... sont les aspects moins manifestés du bon shizei. L'erreur la plus courante est de privilégier  l'aspect uniquement  physique, ou son contraire, s'en remettre à des connaissances plus ou moins vagues de certaines aptitudes psychiques. Encore une fois les orientaux ne créent pas la dualité, mais pratiquent  la philosophie du "Un" dont la manifestation est plus ou moins "exprimée". Les plus "manifestés"  yin sont aussi importants que les moins manifestés yang, et font partie d'un tout. C'est pour cette raison qu'une voie telle que l'Aïkido fait progresser son adepte car le plus petit détail, le plus petit  mouvement,  contient  ou ne contient  pas la connaissance de l'aïkido. Seule l'expérience du plus yin ou plus yang permet le progrès ;privilégier le côté yang ou yin, c'est rester dans la manifestation du physique-sport ou du psychisme-jeu intellectuel de la pensée discursive :ce n'est pas une voie. C'est créer la dualité. Ceci est particulièrement mis en évidence dans irimi et tenkan : 2 concep­ tions opposées et dont la connaissance nous ouvre chaque jour des perspectives. Dualité apparente, seuls les paradoxes nous permettent d'évoluer puisque la voie ne peut être décrite  ou expliquée, on peut dire c'est cela , ou ce n'est pas cela. Et plusieurs degrés de compréhension existent selon le degré de pratique.

Prendre à la lettre la caricature d'un bon shizei ou d'un bon irimi, empêche le pratiquant  de progresser car celui-ci  s'attache à cette caricature et ne voit que le côté extérieur.

 

L'imagination mal utilisée- la recherche dans des voies différentes: le shizei du judo ou celui du kendo, la concentration du yoga - devrait, selon nos bons principes, nous faire progresser, et bien non. La compilation culturelle, la caricature de plusieurs maîtres ou de plusieurs arts ne nous permettront pas de progresser.

 

C'est pourquoi l'Aïkido  est une voie paradoxale  : irimi, tenkan ;tori, aïté (à la fois partenaire et adversaire) ; omoté, ura ; cela démontre  le génie du fondateur. Créer un art martial  réellement  efficace  (destructif)  pour le bonheur  de l'homme (construction de l'homme) dont chaque mouvement,chaque technique nous oblige à prendre conscience du moins manifesté au plus manifesté,'selon les 2 principes régissant la manifestation yin yang. Nous faire quitter  la dualité  (combat  réalité martiale)  pour rejoindre  l'unité  (réalisation de l'homme).

 

A la lumière  des récentes découvertes sur les ondes de forme, recherches suivant lesquelles des volumes aux caractéristiques  particulières  auraient certains effets sur l'homme, on peut se faire une idée de ce que par expérience millénaire, les yogis, les chinois (confucianisme), les japonais ont constaté depuis longtemps  (les mudras ou postures en yoga). La forme  pyramidale et les égyptiens  nous posent encore beaucoup de questions.

 

Selon l'énergétique chinoise  :

 

l'énergie  yang céleste et l'énergie  yin terrestre se rejoignent  au niveau du tanden qui, par analogie avec la pyramide, correspondrait à la chambre mortuaire. Huxley lui attribue  des pouvoirs mystiques  extraordinaires.

 

En conclusion  Me Tamura dit de Shizei : “Souple, équilibré, mouvement, déplacement  facile.”

 

Nous dirons que c'est le côté le plus apparent du shizei, que c'est la description  de celui-ci car ces critères les plus visibles, s'ils sont une nécessité, ne sont pas un but.

 

Tout un empilage d'expériences de travail, de connaissances intuitives d'évolution personnelle dans la discipline,vont faire que notre shizei aura ces carac­ téristiques mais ce n'est qu'une conséquence sinon une explication, et 3 mn d'exercices suffiraient  pour un bon shizei. Malheureusement ce n'est pas aussi simple.

 

Alain PEYRACHE –Traité didactique d’aïkido traditionnel